21 mai Ghissignies Rouvignies

Nuit du 20 au 21 mai et journée du 21 mai

Le débouché de l’avant-garde de la forêt de Mormal s’exécute sans encombre et sans résistance importante, quelques engins ennemis se replient après échange de coups de feu.

Mais, à mesure que la Division progresse, de nombreux fusiliers allemands jalonnent sur ses deux flans sa progression.

L’avant-garde, parvenue vers 1 h. 30 au passage en dessous de Ghissinies est arrêtée par une ancienne barricade française abandonnée, protégée par des mines et des obstacles anti-chars.

Les mines sont enlevées, l’obstacle déblayé et déposé sur les bas cotés de la chaussée. L’avant-garde s’écoule alors normalement.

La tête du gros se présente à 2 h. Il reste encore plus d’une heure de nuit. Le débouché de la Division de la forêt de Mormal semble assuré.

Mais un de nos chars du gros de la colonne dont le conducteur aborde trop vite la pente sinueuse de la route à l’entrée du passage en-dessous ( ?), déboîte à droite de la chaussée et fait exploser une mine qui n’avait pas été enlevée sur le bas coté. Le char qui le suit déboite à gauche et s’empale sur un énorme pieu, formidable obstacle anti char qui avait été retiré sur le bas coté gauche de la route. Les 2 chars immobilisés barrent complètement la chaussée.

Pendant plus d’une heure, toute la colonne est à nouveau arrêtée tandis qu’on s’efforce de dégager la chaussée en déplaçant à l’aide des quatre chars ceux qui barrent la route.

L’avant-garde est pendant ce temps arrêtée aux lisières N.O. de Ghissignies pour former tête de pont à l’Ouest de ce passage en dessous.

Au point du jour, la chaussée est entièrement dégagée et l’artillerie qui, pendant l’arrêt avait serré sur la batterie de tête, parvient enfin à passer.

A ce moment, de nombreux nuages de poussières qui se déplacent de l’est vers l’Ouest, au Nord de et au Sud de Ghissignies semblent indiquer l’arrivée d’éléments motorisés ennemis.

Au Nord, une colonne semble se diriger de Le Quesnoy vers St. Martin et essayé de couper la route de l’avant-garde et essaye de couper la route de l’avant-garde.

Au sud, la situation est moins visible, la crête où passe la route d’Englefontaine à Le Quesnoy barre l’horizon et laisse apercevoir de hauts nuages de poussières en direction d’Englefontaine.

Après le passage de l’artillerie et des premiers éléments du 6e R.T.M., une interruption se produit dans la colonne.

Cette interruption se prolongeant, le Cdt de la 5e D.I.N.A. donne l’ordre à une section de chars de faire demi-tour et de se porter jusqu’à la route d’Englefontaine à Le Quesnoy pour voir la situation et éventuellement aider le reste de la colonne à se dégager. Mais les chars sont à bout d’essence. Il faut rechercher des bidons dans Ghissignies pour les ravitailler et lorsque une heure après 2 chars sont en mesure de remplir cette mission, ils ne possèdent encore qu’une quantité d’essence leur procurant une capacité de manœuvre très limitée.

Le Cdt de la 5e D.I.N.A. prescrit alors au Cdt de l’ID/5NA de constituer avec les éléments du 6e R.T.M. déjà parvenus à Ghissignies un échelon de recueil à la voie ferrée pour y recevoir les autres éléments du gros et l’arrière garde dans le cas où ceux-ci seraient vivement pressés par l’ennemi.

Ces dispositions prises à Ghissignies le Cdt de la 5e D.I.N.A. décide de laisser au Cdt de l’ID/5NA le soin de regrouper les éléments attardés et de rejoindre lui-même l’avant-garde et l’artillerie qui doivent être au contact de la colonne ennemie motorisée signalée en marche de Le Quesnoy vers St. Martin.

En traversant le village de St. Martin, la voiture du Cdt de la Division croise un motocycliste allemand qui n’a pas le temps de l’identifier, accélère l’allure et défile à pleine vitesse devant un escadron motorisé ennemi rangé dans le pré d’une ferme, qui surpris le laisse passer et tente vainement ensuite de le faire poursuivre par une auto mitrailleuse.

Le Commandant de la 5e D.I.N.A. suivant l’axe de la marche de la Division parvient à Roussignies sur l’Escaut (ndlr : très certainement Rouvignies) sans rencontrer ni avant-garde ni artillerie, ni aucune trace de combat.

Le pont de Roussignies (ndlr : très certainement Rouvignies) est tenu par des éléments de la 4e Division d’Infanterie. L’ordre de mise à fau est déjà donné. Le Commandant de la 5e D.I.N.A. obtient que l’exécution de cet ordre soit différé jusqu’à la rentrée de sa division. Pas de renseignement sur l’artillerie et l’avant-garde de la 5e D.I.N.A.

Le Cdt de la 5e D.I.N.A.apprend que le P.C. de la 12e D.I.M. est à Valenciennes. Il décide de s’y rendre aussitôt en vue :

-       D’obtenir que la mise à feu du dispositif de mine sur le pont de l’Escaut, entre Denain et Valenciennes soit (sauf exigence absolue) différé jusqu’à la rentrée de la 5e D.I.N.A.

-       De se renseigner sur la situation générale et sur la situation particulière des éléments de la 5e D.I.N.A. qui n’avaient pas participé à l’opération dans la forêt de Mormal.

-       D’obtenir des renseignements sur la rentrée éventuelle par un autre pont de l’avant-garde et de l’artillerie du détachement de Mormal.

Le Général Jansen lui apprend que les forces françaises défendent l’Escaut, que les éléments de la 5e D.I.N.A. qui n’ont pas participé à l’opération dans la forêt de Mormal   ont été regroupés à l’ouest de Denain (P.C. Abscon) et que le P.C. du Ve C.A. est à Raches. Pas de nouvelle de l’avant-garde et de l’artillerie du détachement  de la forêt de Mormal.

Le Commandant de la 5e D.I.N.A. retourne à Rouvignies, retraverse l’Escaut et reprend en sens inverse l’itinéraire de la division.

En arrivant à l’entrée de Monchaux (ndlr : sur Ecaillon) il croise son avant-garde qui en débouche.

Le Cdt Guillebaud lui rend compte des faits suivants :

Les éléments des II/24e R.T.T. et l’artillerie avaient été séparés du I/24e R.T.T. par l’obstruction des chars au passage en dessous de Ghissignies sont passés par Vertain, au lieu de prendre l’itinéraire par St. Martin.

En arrivant sur le terrain d’aviation de Vertain, la tête de la colonne d’artillerie a été brusquement assaillie par quelques engins blindés ennemis. Grâce au sang froid des artilleurs du 22e R.A.C. qui mirent rapidement 3 chars ennemis hors de combat, la colonne a pu se dégager, mais 8 canons privés de leurs attelages ont du être abandonnés sur le terrain. Le reste du mouvement s’est effectué sans incident.

Le 24e R.T.T. ,moins le btn d’arrière garde non encore rentré et le 22e R.A.C sont alors dirigés vers la zone de stationnement de la division à l’ouest de Denain où se trouvai déjà le 14e Zouaves, le 1er B.M., la Batterie antichars, le 22e R.A. et les services de la division qui n’avaient pas participé à l’opération sur la forêt de Mormal.

Espérant que les éléments retardataires laissés à l’Est de Ghissignies ne comprenaient presque plus que de l’infanterie et des chars parviendraient eux aussi à se dégager et à rejoindre les lignes françaises, non pendant la journée, au moins au cours de la nuit, le Cdt de la D.I.N.A. se rend au P.C. du Ve C.A. à Raches pour y rendre compte de la situation sur sa division et recevoir de nouveaux ordres.

Au cours de l’après-midi et dans la matinée du lendemain arrivent peu à peu, par petits paquets, quelques éléments du reste de la colonne, en particulier le Colonel OGER Cdt l’ID/5NA et le Cdt LEVEQUE qui commandait l’arrière garde.

Le Colonel OGER rend compte des faits suivants : …1/4 d’heure environ après le départ de Ghissignies du Commandant de la 5e D.I.N.A. le village a été très violemment bombardé par l’aviation et l’artillerie ennemies, les défenseurs ont été pris à revers par une attaque d’engins blindés venant de l’ouest.

Le Colonel OGER était informé en même temps que le reste de la colonne avait été violemment attaqué par des engins blindés et essayait de rejoindre les lignes françaises par petits groupes.

Ayant réussi à regrouper une centaine de tirailleurs à l’ouest de Ghissignies vers 8 heures, il s’était replié à travers champs, poursuivi par des engins blindés et des motocyclistes ennemis.

Après avoir marché à la boussole toute la journée du 21 et la nuit du 21 au 22, il était parvenu, en évitant les localités, à se frayer un passage à travers les postes ennemis et à repasser l’Escaut le 22 au matin au pont détruit de Bouchain. Il ramenait avec lui une centaine de tirailleurs du 6e R.T.M. provenant de Ghissignies et quelques isolés du reste de la colonne qui l’avait rejoint en cours de route. Il était accompagné de ses officiers d’E.M. la Capitaine Rosset et le Lieutenant Grosbon.

Le Cdt LEVEQUE fournit les renseignements suivants sur le reste de la colonne.

Après le débouché de ses éléments de tête, le mouvement du gros de la colonne, à la sortie de la forêt de Mormal s’était effectué très lentement par suite des incidents qui avaient retardé l’avant-garde (rencontre d’engins ennemis isolés). La colonne avait été complètement immobilisée à partir de 1 heure (embouteillage de l’avant-garde, puis de l’artillerie au passage en dessous de Ghissignies.

Vers 3 heures (au moment où le passage venait enfin d’être rétabli … de Ghissignies) une colonne motorisée ennemie (environ 150 véhicule et de nombreux motocyclistes venant du N.E. et se dirigeant sur le carrefour de Poix du Nord ; 5 km sud de Ghissignies) a barré la route aux éléments qui n’avaient pas encore débouché de la forêt.

Pendant ce temps, le III/24e R.T.T. était harcelé à Englefontaine par des automitrailleuses et des armes automatiques isolées.

Le 3e R.T.M. ne parvient à déboucher de la forêt qu’à 7 heures. Il se déploie face au N.O. à droite et à gauche de la route Englefontaine Le Quesnoy, mais pris sous un feu violent, d’infanterie et d’artillerie, il ne peut progresser.

Après avoir attendu jusqu’à 7 heures 45, à Englefontaine pour permettre le déploiement du 3e R.T.M., le Cdt LEVEQUE décide de forcer le passage à droite du 3e R.T.M. appuyé par les 3 chars qui lui restent.

Cette opération s’effectue avec les 9e et 11e Cies en 1er échelon, 10e Cie en 2e échelon, les mitrailleuses sont réparties entre les Cies d’infanterie.

La mise en place s’effectue sans difficulté et l’attaque débouche … heures. Elle progresse en direction du N.O. et traverse les éléments de (tête ?) du 3e R.T.M.

A l’arrivée sur le plateau, les unités sont soumises à un très violent tir d’arrêt de 105, 2 chars sont mis hors de combat. Les éléments de tête réussissent à franchir le passage par petits paquets, mais les Cies du 1er échelon, disloquées par ce barrage, subissent de fortes pertes. La Cie de 2e échelon, mélangées aux éléments du 3e R.T.M., ne progresse plus. Les éléments qui ont franchi le barrage sont poursuivis par des motocyclistes et par des tirs d’artillerie ennemis. Ils poursuivent le mouvement par petits paquets en direction d’Haspres et parviennent à franchir l’Escaut le 22 au matin à Denain et Bouchain.

Des isolés du 6e R.T.M. font connaître que le Cdt THOMAS Cdt. le 6e R.T.M. a pu également se frayer un passage à travers les lignes ennemies et s’est efforcé de rejoindre avec ses hommes, par petits paquets, le canal de l’Escaut. Mais son arrivée est vainement attendue. Aucun des tirailleurs du 3e R.T.M. n’a pu rejoindre les lignes françaises et y apporter des renseignements sur ces 2 Bataillons.

L’après-midi du 21 et le matin du 22 sont employés à reconstituer la Division désormais réduite comme éléments combattants aux unités ci-après :

Infanterie (1) :

14e zouaves (à 3 Btns n’ayant subi que de faibles pertes)
24e R.T.T. (à 2 Btns, les survivants du 3e Btn sont répartis, reste les autres Btns pour les recompléter).
1 Cie du 6e R.T.M. (une centaine d’hommes environ)
1er Btn de mitrailleurs (n’a subi que de faibles pertes).

Chars (2) :

Le détachement réduit à environ 18 chars, partie S.O.M.U.A., partie R 35

Artillerie (3) :

22e R.A. (à 2 groupes)
222e R.A. (n’a subi que de faible pertes)
10e Bie antichars divisionnaires (au complet)
655 Bie A chars  (à 4 pièces).

1)    Le 14e zouaves avait fait mouvement dans la nuit du 19 au 20 avec le 1er B.M. et le 10e antichars, de la position de la Trouille vers la Région Nord de Valenciennes conformément aux ordres qui lui avaient été donnés par la 12e D.I.M. Il était cantonné depuis le 20 à Escaudin.

2)    Ces chars sont remis à la disposition du V e C.A.

3)    Le 22e R.A.C. a perdu 8 canons à Vertain et 2 canons avec l’arrière-garde à Englefontaine. Les 2 pièces restantes sont affectées au 222e R.A. comme pièces antichar.